EGLISE ORTHODOXE logo du diocèsePATRIARCAT de MOSCOU

DIOCESE DE CHERSONESE
HISTOIRE
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LA FONDATION DE LA PAROISSE DES TROIS SAINTS HIÉRARQUES :
les fondements théologiques et spirituels du retour à l’Icône.


La rupture avec le Métropolite Euloge

        Vers la fin des années 20, l’Eglise Russe se trouvait dans une situation particulièrement délicate et difficile.

        « Lorsque mourut le Patriarche Tykhon en Avril 1925, l’Eglise se remettait à peine de plusieurs années de terreur, au cours desquelles des milliers de clercs et de laïcs furent physiquement supprimés. Mais les persécutions physiques ne pouvaient ralentir le rétablissement spirituel de l’Eglise, libérée pour la première fois depuis quatre cents ans de toute obligation séculière et gouvernementale. (…) Malgré le soutien continuel accordé par le régime tant aux Rénovateurs qu’aux sectes, (…) les souffrances endurées par l’Eglise lui valurent le soutien national à un degré jamais égalé.  »
Cependant, « l’Eglise était pratiquement hors la loi. Près de la moitié de ses évêques étaient arrêtés ou déportés ; ceux qui ne l’étaient pas ne pouvaient administrer leur diocèse où les schismes faisaient rage : « l’Eglise vivante », « l’Eglise de la Rénovation », les Joséphiens, les Grégoriens, les « Véritables Chrétiens Orthodoxes » et la « Véritable Eglise Orthodoxe », etc… Le plus dangereux, le Synode de « l’Eglise de la Rénovation », était légalisé et soutenu par le gouvernement auquel il s’efforçait de s’adapter. La légalisation de l’Eglise était la première tâche qui s’imposait au Patriarche  ».

        Cette légalisation exigeait que soient « précisés les rapports entre l’Eglise et l’Etat dans les conditions nouvelles. Ceci n’était pas possible tant que les autorités séculières avaient toutes les raisons de voir dans l’Eglise une ennemie : ne s’élevait-elle pas contre l’Etat dès qu’elle le pouvait, c’est-à-dire à l’étranger ? N’avait-elle pas, en plein blocus, en pleine famine, essayé d’empêcher la reconnaissance du gouvernement soviétique par les Etats occidentaux ? Ainsi le clergé et les évêques à l’étranger ne portant eux-mêmes aucune responsabilité pour leur activité politique, faisaient-ils payer cher leur « liberté » à l’Eglise russe. »

         « Le gardien du trône patriarcal après la mort du Patriarche Tikhon, le métropolite Pierre de Kroutitsy, ayant été déporté, l’administration était assurée par son remplaçant, Monseigneur Serge, métropolite de Nijni Novgorod, qui fut également arrêté pendant plusieurs mois. (…) Pour défendre l’Eglise et bien délimiter le domaine ecclésiastique en le séparant du domaine politique, le métropolite Serge, avec le Synode patriarcal (à l’exemple du Patriarche Tikhon) adressèrent au métropolite Euloge un décret daté du 14 Juillet 1927 dont le premier paragraphe demandait aux évêques et aux membres du clergé à l’étranger de lui fournir un engagement écrit, personnel, de ne rien permettre « dans l’activité publique et tout particulièrement dans l’activité ecclésiastique qui puisse être pris pour une expression de déloyauté envers le gouvernement soviétique.  »

Monseigneur EulogeLe métropolite Euloge fit publier ce décret dans le « Tserkowny Vestnik  » ainsi qu’un sermon prononcé sur cette question, où il leur « demandait de rester fermement attachés au métropolite Serge et de se garder de le juger : « Vous vous souvenez comment, il y a peu de temps, on jugeait le défunt Patriarche Tikhon (…) ; méfiez vous de juger prématurément le métropolite Serge (…). Il nous est très important, je dirais plus – indispensable, de préserver notre unité avec notre Mère, l’Eglise russe. (…) Ce n’est que dans son sein salutaire que notre vie ecclésiastique peut se développer normalement, ce n’est que dans cette unité que nous trouvons un appui moral irremplaçable dans toutes nos épreuves (…). Si notre chef hiérarchique nous dit que les manifestations politiques du clergé à l’étranger font à l’Eglise Mère un tort incalculable, qu’elle paie pour elles là-bas et souffre, (…) alors certes, par amour pour elle nous devons renoncer à ces manifestations afin de ne pas être pour elle une entrave, surtout en ce moment difficile et responsable où elle commence à s’organiser. (…) Si l’œuvre du Métropolite Serge vient des hommes, elle se détruira ; mais si elle vient de Dieu, (…) ne courrez pas le risque d’avoir combattu contre Dieu ( Actes, 5, 38-39 ). Le Seigneur nous le montrera bientôt  . »

        Le futur Archimandrite Serge, alors Kyrill Schevitch, écrivait en Octobre 1929 :

        « L’arme principale de la lutte contre l’Eglise est de l’accuser d’être déloyale et de participer à la lutte politique contre le pouvoir actuel. Ce point d’accusation pourrait réellement être préjudiciable à l’Eglise, si elle insistait sur son rejet politique du pouvoir, déclarait publiquement qu’elle ne le reconnaissait toujours pas et incitait les fidèles à l’opposition politique. Les bolcheviques pourraient alors détruire plus facilement la vie religieuse et priver le peuple de toute protection pastorale, renforçant ainsi le processus d’éloignement de la foi de ses pères, le poussant vers l’athéisme ou vers les sectes qui, dès le début de la révolution, ont mieux su s’adapter aux nouvelles conditions de vie. (…) Les sages dirigeants de l’Eglise capables de se sacrifier, le Patriarche Tikhon en tête, ont trouvé assez de force spirituelle pour se priver de ce qui leur était cher et habituel. Ils ont eu le courage de renoncer à avoir une position politique et de sortir l’Eglise des eaux troubles des passions idéologiques.

        « Le patriarche Tikhon et ses successeurs qui, malgré les tentations, ont su sauver l’Eglise Orthodoxe de la vie politique et définir une nouvelle position, purement religieuse, ont de ce fait privé les ennemis de l’Eglise de leur arme la plus puissante – la possibilité de combattre l’Eglise en tant qu’organisation politique.  »

         « Cependant le métropolite Euloge demanda des précisions : que fallait-il entendre par « loyauté » ? Lui-même et son clergé ainsi que ses ouailles, n’étaient pas des citoyens soviétiques; comment pouvait-on exiger d’eux une obéissance aux lois d’un gouvernement qui n’était pas le leur ? « Je m’engage, écrivait-il, à demeurer ferme dans l’attitude déjà établie chez nous, conformément aux préceptes de sa sainteté le Patriarche Tikhon, de non intervention de l’Eglise dans la vie politique, et à ne pas permettre que, dans les églises de mon obédience, l’ambon ecclésiastique soit transformé en tribune politique. » Le métropolite Serge répondit par lettre, en disant que «le terme de loyauté ne pouvait certainement pas signifier une obéissance aux lois soviétiques », que d’ailleurs il n’insistait sur aucune formule de l’engagement demandé. Et lorsque plus tard les membres du clergé, à deux ou trois exceptions près, eurent donné cet engagement, le métropolite Serge consentit, à la demande de monseigneur Euloge, à ce que ces documents ne lui fussent pas envoyés, mais gardés dans ses bureaux. (…) L’attitude du métropolite Euloge était  à cette époque, on le voit, [conformément à la position récemment  adoptée vis-à-vis du Synode Hors Frontières ], canoniquement nette  » et semblait faire preuve d’une toujours égale fidélité au Patriarcat de Moscou.
 


 
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28/08/2003